Dancefair Masterclass

Notre vision du Dancefair 2018

Pour nous, producteurs de musique électronique, il n’y a que peu d’événements dans l’année permettant de regrouper notre communauté. Outre la Miami Music Week et L’Amsterdam Dance Event, qui sont des phénomènes mondiaux, donc hors de portée pour la plupart, un événement de taille plus modeste se tenait le week end du 17 février à Utrecht. Le Dancefair regroupe donc des exposants (principalement des boutiques de matériel audio), des labels, des interviews et masterclasses effectuées par des artistes reconnus. Certains d’entre eux étant d’ailleurs disponibles pour discuter, donner un avis sur certains tracks ou apporter des réponses aux problèmes de certains producteurs.

Voyons donc en détail ce que le Dancefair peut apporter aux artistes, et ce que vous pouvez en attendre.

NB : Cet article se base sur mon expérience personnelle au Dancefair. Il sera probablement beaucoup plus subjectif que les autres articles présents sur le site.

La localisation et l’organisation

L’événement était donc situé au Jaarbeurs, à Utrecht, un ensemble de halls d’exposition à moins d’une demi heure d’Amsterdam. Le complexe est situé idéalement, juste en face de la gare locale. Le staff était très bien organisé si bien que l’entrée et la plupart des présentations se faisaient sans temps d’attente. Seuls quelques masterclass et interviews de headliners (Armin Van Buuren, Mike Williams…) nécessitaient d’être présent un quart d’heure en avance afin d’avoir une place assise. En bref l’organisation de l’événement en lui même était très bien gérée. Petit point noir cependant, les formules “pass + hôtel”. Car si l’hôtel dans lequel nous avons séjourné était très beau, en revanche il n’était pas facile d’accès en transports en commun. La mise en place d’une navette faisant l’aller-retour après 18h (lorsque les délais de passage des bus commencent à se rallonger) aurait rendu l’expérience encore meilleure.

Les stands

Deux halls étaient réservés au Dancefair. Un troisième était en préparation du festival A State Of Trance 850 qui se déroulait le samedi soir, et où étaient présents plusieurs intervenants du Dancefair. Dans le premier étaient disposés de nombreux stands de matériel de mix / MAO et labels. Quand au second, il était destiné à accueillir les conférences. Entre les deux se trouvait un espace dédié au mix.

Les stands d’expo

Près de 80 stands étaient disposés dans le premier hall. Nous avons observé beaucoup de boutiques néerlandaises de matériel audio. Ce qui m’a permis de tester plusieurs synthétiseurs analogiques et numériques tels que le Minimoog Model D ou le Peak de Novation, ainsi que les platines haut de gamme de Denon : les SC5000 Prime. Bref, beaucoup de matériel de qualité.

En avançant un peu plus, après les stands de restauration, étaient disposés des labels et des professionnels spécialisés dans les différents DAW. Beaucoup de diversité donc, mais ce n’est pas ce qui a le plus attiré mon attention ici.

Demo Drop

Les labels et l’espace Demo Drop permettaient d’avoir un feedback venant de professionnels sur nos tracks. Les représentants de chaque label avait leur propre casque. Ceci afin de saisir les nuances par rapport à leurs tracks de référence et aux autres productions écoutées dans la journée. Peu de tracks sont véritablement signées lors de l’événement, cependant, certains labels se trouvent intéressés par les productions écoutées et nous encouragent à leur envoyer nos productions suivantes le cas échéant.

The Network

The Network était un moyen de discuter avec des artistes reconnus. Et pourquoi pas leur poser de nombreuses questions sur leur travail, leur vision de la musique, des problèmes que l’on peut rencontrer en production ou encore avoir, là aussi, leur feedback sur nos tracks. Ces artistes étant très sollicités, les rencontres nécessitaient d’avoir pris rendez vous au préalable sur un des stands à proximité. Les durées de rendez vous estimées étaient de 5 minutes.

Pour ma part, j’ai pu rencontrer John Christian (Protocol Recordings, Musical Freedom…), qui contrairement à la plupart prenait réellement le temps d’avoir une discussion avec chacun des participants. L’avantage était bien sur d’avoir une conversation bien plus constructive et intéressante que si nous avions été bloqués par le temps. Mais l’inconvénient prévisible est que le retard s’est accumulé pour les participants suivants et les derniers ont dû passer plus d’une heure après l’heure prévue (les conversations ont d’ailleurs dû être déplacées sur le stand Musical Freedom après la fin du temps dédié aux rencontres). Le bilan global reste tout de même très positif tant la conversation s’est avérée intéressante et le feedback sur mes productions constructif.

Les masterclass et interviews

David Gravell

La première masterclass auquel j’ai pu assister était aussi l’une des plus intéressantes. L’artiste a expliqué sa façon de procéder pour commencer une track, en s’attardant particulièrement sur l’aspect du sound design. Il nous a également livré quelques anecdotes sur sa vie (Un des seuls producteurs qui a commencé par produire de la musique de film à ma connaissance).

Ce qu’on en retient

  • David Gravell utilise de nombreux samples (souvent des FX atmosphériques) et les edité avec le plugin Padshop Pro sur Cubase
  • Commencer par créer la section principale de la track (en général, le drop), puis construire autour.
  • Utiliser un maximiseur sur les basses (un compresseur qui permettra d’augmenter le volume général des basses et d’atténuer ls différences entre les notes)
  • Utiliser un compresseur multibandes type OTT sur les leads, puis appliquer une reverb sidechainée pour augmenter leur impact.
  • Trick Nexus2, dans l’onglet mix essayez de désactiver certains éléments pour isoler un des samples

Padshop Pro

Mark Villa

L’artiste nous a présenté sa collab avec Jonas Bue : In Your Arms Tonight. Et le projet était réellement… Brouillon! Mark Villa à donc dû s’y reprendre à plusieurs fois lors de la recherche de chaque layer de lead…

Ce qu’on en retient

  • Organiser son projet, par exemple en utilisant des templates (article à venir sur le site)
  • Ce n’est pas nouveau, mais bouncer les pistes en Wav autant que possible, Surtout pour les ordinateurs qui ont des performances moyennes ou basses. Cela permet de réduire grandement la charge du CPU.
  • Reverse un kick avec un spectre de type “sub bass” produit un effet intéressant en pré drop

Brooks

Peu de nouveautés par rapport à sa précédente masterclass au Dancefair de l’an dernier. Le projet présenté était cette fois le remix de Zayn – Dusk Till Dawn. Beaucoup de sound design avec Spire, une utilisation intéressante du vocal original et une astuce intéressante qui est de s’amuser a sampler vos propres synths et y appliquer des effets, cuts, disto, etc… ce qui permet de donner des informations intéressantes. Pour le reste, beaucoup de techniques avaient déjà été données lors de la masterclass dédiée a Boomerang.

Armin Van Buuren

Dire que cette interview était très attendue relève de l’euphémisme. Probablement l’événement le plus chargé du Dancefair. La foule entassée devant la salle de conférence en disait long sur les attentes des spectateurs. DJ Jaydee était en charge de cette interview qui revenait sur les débuts de la carrière du producteur, puis sur son ascension au sommet et enfin sur sa vision de l’avenir pour finir avec de nombreux conseils pour les DJ et producteurs.

Ce qu’on en retient

  • Tester autant que possible la réaction du public à une nouvelle track, jouer le son en club/bar/festival …
  • Toujours chercher à avoir un feedback honnête. Certes votre meilleur ami ou vos parents vous diront que votre son est exceptionnel, mais ils ne sont probablement pas des professionnels dans ce milieu.
  • La clé du succès selon Armin : Un peu de chance + Beaucoup de travail en production + apprendre un peu de chaque nouvelle track
  • Toujours être critique envers soi-même. Le son parfait n’existe pas. Cherchez les imperfections, aussi minimes soient elles.
  • Apprendre avec d’autres producteurs est un des meilleurs moyens de s’améliorer. Faites des collaborations.
  • Ne recréez pas le son de quelqu’un d’autre. Vous ne serez qu’une copie parmi tant d’autres.
  • Concernant le mix, Armin n’a pas de problème avec les sets pré enregistrés, du moment que la réponse du public est positive. Cependant, il pense que les compétences d’un DJ sont des plus importantes car elles permettent justement de s’adapter à la réaction du public.
  • Pour finir, soyez un geek. La base de la production est de tourner des boutons pour créer des sons. Il faut savoir s’amuser de cette façon.

Mesto

La journée du dimanche a ramené davantage de monde que celle du samedi. Dès la première masterclass, la salle principale (réservée par Spinnin pour la journée) était complète. Le jeune producteur nous a donc présenté d’abord sa track Chances, puis apporté de nombreuses astuces plutôt intéressantes.

Ce qu’on en retient

  • Mesto débute la plupart de ses tracks avec les chords (sur Sylenth1)
  • Pour Chances, il utilise ensuite un VST de guitare pour créer la mélodie, puis réenregistre à la guitare en appliquant un EQ sur la piste.
  • Hormis Sylenth1 et Massive, il utilise de nombreux plugins natifs de FL Studio (Harmor, Hardcore). On a également pu apercevoir certains VSTs de FL Studio Mobile.
  • Pour ajouter du punch au lead principal, rajouter un léger white noise, très court, au début de chaque note.
  • Utiliser un crash sur le 2nd kick du drop (l’exemple de Chances est assez parlant, voir la vidéo ci dessous
  • appliquer un sidechain plus ou moins léger sur quasiment tous les éléments (hormis le kick bien entendu).

Sick Individuals

Probablement la masterclass la plus intéressante et complète du Dancefair. Le duo a abordé plusieurs points : le workflow de création de leurs sons pop, et plusieurs techniques utilisés sur leurs sons plus orientés club, dont leur technique de “vocoder” pour créer leur distorsion caractéristique des voix.

Leurs sons Pop

Voici les différentes étapes de création de ce style de tracks:

  1. Songwriting
  2. Lyrics & premier enregistrement de vocals
  3. Test de plusieurs chords
  4. Drop!
  5. Structure
  6. Enregistrement du vocal final
  7. Nouveau projet avec les vocals et le projet précédent bouncé en wav
  8. Edition des vocals, compression, reverb, delay…
  9. Projet final
  10. Mixage, Mastering

Leurs sons Club

Plusieurs astuces ici sur de nombreux éléments, voici ce qu’on en retient :

  • Utiliser un glitch sur le kick (ce qui permet une baisse de fréquence sur la fin du kick).
  • mixage du kick et de la basse avec LFO Tool, laisser de l’espace uniquement pour les hautes fréquences du kick. Ce qui se rapproche de notre façon de mixer ces éléments.
  • Sur les EQs, ne pas couper “sèchement” les fréquences mais privilégier une baisse progressive de celles ci .
  • Combiner instruments réels et VST (l’exemple illustré était sur un piano).
  • Vocoding effectué avec Izotope Nectar 2 et un pitch des vocals.
  • Essayer d’appliquer une reverb sur les bass, l’effet peut être intéressant.
  • Une question à été posée sur leur mixage des subs. Le duo préconise d’écouter uniquement les subs et de les comparer à une track référence. Ceci permet de vérifier que le volume est conforme à nos attentes (très utile surtout si votre studio n’est pas équipé de subwoofer dédié).

Matt Nash

Un cadre beaucoup plus intimiste dans une salle nettement plus petite que les autres masterclass auxquelles j’ai assisté. Le producteur est revenu sur plusieurs de ses tracks, principalement Let You Go.

Ce qu’on en retient

  • Utilisation importante de librairies Kontact (NI)
  • Le sub provient de Nexus2 (SQ Complextro + effet portamento)
  • La Staccato Brass caractéristique provient d’une librairie Kontakt + audio bounce. Puis application de traitement comprenant ValhallaRoom, EQ et une disto CamelPhat.
  • Bells “Marimba” inspirées de Michael Calfan -Treasure Soul
  • Plugins intéressants sur le master : H82 Harmonic Mixer et Stillwell EventHorizon.

H82

EventHorizon

Mike Williams

La nouvelle star de Spinnin n’a pas été épargné par les problèmes techniques en début de présentation. Un système de caméra filmant l’écran à été mis en place et la masterclass a fini par avoir lieu.L’artiste est revenu sur deux de ses projets bien connus des fans: You & I avec Dastic (qui était présent dans le public) et Lullaby avec R3hab. Petit plus pour l’exclu diffusée en fin de masterclass.

Ce qu’on en retient

  • Mike Williams commence généralement ses projets par les chords, puis les bass… le reste se structure naturellement autour de ces deux éléments.
  • Les vocal chops de You & I ont été retravaillées avec plusieurs effets de base : Overdrive, BEAUCOUP de reverb et une compression simple.
  • beaucoup de presets Sylenth1 provenant de packs de presets (type Vandalism)
  • Pour le lead de Lullaby, on note l’application de transient et de white noise pour augmenter le côté “percussif”
  • Soundshifter utilisé pour pitcher divers éléments
  • Compression avec The Glue, avec pour paramètres atk à 0 et release max (A), donne un effet intéressant. A essayer.

En bref

Un excellent weekend passé à Utrecht. Je ne peux que conseiller aux producteurs débutants et confirmés de tenter l’expérience Dancefair. Car si les vidéos des conférences sont régulièrement retransmises quelques semaines plus tard sur YouTube, rien ne vaut le contact avec les artistes. Ceux ci sont de loin les mieux placés pour répondre aux questions que vous vous posez, qu’il s’agisse de technique ou de marketing/management. De plus, les labels sont très disponibles et leurs retours sur vos productions sont globalement très pertinents. Avec ça, d’autres bonus sont compris dans le prix du billet.

Dancefair Gift bag

Parmi ces bonus, nous avions un sac cadeau comprenant des coupons de réduction sur plusieurs produits et services dans le domaine de la production. Celui-ci possède également une licence pour la version ”lite” du DAW Bitwig. Intéressant pour essayer un nouveau logiciel sans avoir à passer à la caisse ou chercher un crack… Et enfin, le plus intéressant selon moi, reste la version papier du livre de Maarten Vorwerk : Vorwerk Tip of the Week: The Ultimate Handbook to Become a Succesfull Dance Music Producer. Pour rappel, le ghost producer le plus connu au monde diffuse sur ses réseaux sociaux un conseil par semaine à destination des artistes. et ce, depuis plus de 3 ans. Ce livre regroupe donc les 150 ayant été rédigés jusqu’à sa sortie. Un vrai must have !

A State Of Trance 850

En parallèle du Dancefair, Armin Van Buuren organisait avec son label Armada Recordings un festival pour la 850eme édition de son podcast A State Of Trance. Un grand line up composé de Armin lui même, accompagné de grands noms tels que Ilan Bluestone, Sander Van Doorn (sous son alias Purple Haze), W&W avec leur excellent projet orienté Trance : NWYR, Gareth Emery, David Gravell (également présent au Dancefair) et Ben Nicky pour clôturer ce festival.

L’avis d’une néophyte à propos du Dancefair

Ici, je laisse la parole à Marie, qui m’a accompagnée sur ce weekend (merci encore). Bien qu’elle ne soit pas une spécialiste de la production, j’ai cependant trouvé son avis intéressant et pertinent. Si vous êtes débutants et que vous ne savez toujours pas ce que le Dancefair peut vous apporter, ce paragraphe pourrait vous donner des éléments de réponse.

L’expérience générale du Dancefair

Tout d’abord, l’emplacement à Utrecht est idéal ; juste en face de la gare et dans des locaux modernes et bien agencés.

Les stands d’exposition du matériel étaient bien mis en valeur avec possibilité de tester sur place et avec des vendeurs disponibles pour donner des renseignements.

Le planning du week-end était clair et les horaires ont toujours été respectés au niveau des masterclass.

Les présentations

Les artistes intervenants sont tous très compétents. Avec des pédagogies différentes certes, mais de manière générale ils maîtrisent parfaitement leur sujet.

La masterclass que j’ai préférée est celle de Mesto. Il était très clair et expliquait les choses tellement naturellement qu’il paraissait sympathique et avec de l’humour ce qui apporte un peu plus de vivant et qui rend la masterclass plus ludique pour une personne comme moi qui n’a pas la technique d’un professionnel.

Une autre intervention qui m’a également vraiment intéressée est celle de Sick individuals au cours de laquelle j’ai appris énormément de choses sur la procédure à suivre pour créer une track. Leur pédagogie est, je pense, parfaite ; on voit bien qu’ils ont pas mal d’expérience et qu’ils sont vraiment compétents dans leur domaine.

En revanche, celle avec laquelle j’ai le moins accroché est celle de Mark Villa. Du fait de son jeune âge je pense qu’il n’a pas la maturité et l’expérience nécessaire pour être performant dans ce type d’exercice. Il manque d’organisation et fait facilement décrocher une personne qui n’est pas pro.

Ce que je verrais en point négatif sur cet événement est le manque d’informations et d’organisation concernant les rencontres avec les différents labels. Ils étaient tous regroupés dans la même zone mais n’étaient pas toujours présents. Il fallait donc consacrer pas mal de temps sur ce point qui est quand même un des plus importants, mais on n’a rien sans rien !

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